Lemme de Dedekind
Soient λ1,...,λn n monomorphismes disticts K → L. Dire qu'ils sont linéairement indépendants sur L c'est dire qu'il n'existe pas de n-uple (a1,...,an) ∈ Ln tel que :
a1λ1(x)+...+anλn(x)=0 ∀x ∈ K (1)
Supposons donc le contraire. Quitte à éliminer certains ai on peut supposer qu'ils sont tous non-nuls.
De toutes les équations (1) valides avec tous les ai non nuls il en existe certaines pour lesquelles le nombre n de termes est minimum.
Nous choisissons les ai de sorte que (1) soit l'une d'entre elles.
Ce qui nous permet de supposer qu'il n'existe pas d'équation telle que (1) avec strictement moins que n termes.
Nous devons en déduire une contradiction.
Etant donné que λ1≠λn, il existe au moins un y∈K tel que λ1(y)≠λn(y), et il est clair qu'un tel y est forcément non nul.
Ceci dit, l'équation (1) est vérifiée lorsqu'on remplace x par yx, donc :
a1λ1(yx)+...+anλn(yx)=0 ∀x ∈ K (2)
Si nous multiplions (1) par λ1(y) et que nous soustrayons (2), il vient :
$$\sum_{i=2}^{n}a_{i}\left ( \lambda _{i}(x)\lambda _{1}(y)-\lambda _{i}(x)\lambda _{i}(y) \right )=0$$Le coefficient de λn(x) est an(λ1(y)-λn(y)) et est donc non nul.
Nous avons donc une équation de la forme (1) avec au plus n-1 termes.
Lemme élémentaire d'algèbre linéaire
Nous rappelons un résultat très simple concernant les systèmes linéaires.
Un système de m équations linéaires :
aj1x1+...+ajnxn où 1≤j≤m
où les inconnues et les coefficients appartiennent tous à un même corps commutatif K, possède toujours au moins une solution telle que les xi soient non tous nuls si n>m.En effet (aij) est la matrice d'une application linéaire de Kn dans Km relativement aux bases canoniques. Les solutions du système correspondent au noyau de cette application. Une telle application ne peut être injective.
Lemme élémentaire concernant les groupes
Il suffit de rappeler que x→ gx est une bijection de G sur lui-même la bijection réciproque étant x →g-1x.
Résultat principal
Nous notons |H|, l'ordre (le cardinal) d'un groupe fini H.
Soit H un sous-groupe fini du groupe des automorphismes d'un corps K, et soit H° le sous-corps de K formé des points fixes de H.
Alors K est une extension finie de H° et :
[K:H°]=|H]Soit n=|H| et supposons que les éléments de H soient h1,...,hn l'unité étant h1.
Nous posons m=[K:H°].
Nous montrons d'abord que m≥n.
Supposons donc que m<n et soit (x1,...,xm) une base de K sur H°.
Utilisant le lemme d'algèbre linéaire ci-dessus, nous pouvons trouver y1,...,yn ∈K non tous nuls tels que :
$$h_{1}\left ( x_{j} \right )y_{1}+...+h_{n}\left ( x_{j} \right )y_{n}=0 \; \; \forall j \; 1\leqslant j\leqslant m \; \; \; \; (1)$$Soit a un élément quelconque de K, alors a peut s'écrire de manière unique :
$$a=\alpha _{1}x_{1}+...+\alpha _{m}x_{m}$$ où $\alpha _{1},...,\alpha _{m}\in \text{H°}$Alors:
$$\sum_{i=1}^{n}h_{i}(a)y_{i}=\sum_{i=1}^{n}h_{i}\left ( \sum_{j=1}^{m}\alpha _{j}x_{j} \right )=\sum_{j=1}^{m}\alpha _{j}\left ( \sum_{i=1}^{n}h_{i}y_{i} \right )x_{j}=0$$ce qui prouve que les homomorphismes distincts h1,...hn sont linéairement dépendants, contrairement au lemme de Dedekind.
Nous montrons maintenant que m≤n.
Supposons donc que [K:H°]=m>n. Alors il existe un ensemble de n+1 éléments de K linéairement indépendants sur H°, soient x1,...,xn+1 ces éléments. En utilisant à nouveau le lemme d'algèbre linéaire ci-dessus il existe y1,...,yn+1 éléments de K non tous nuls tels que pour tout j , 1≤j≤n : $$h_{j}(x_{1})+... +h_{j}(x_{n+1})y_{n+1}=0 \; \;\;\; (2)$$Nous choisissons maintenant le n+1-uple (y1,...,yn+1) de façon à ce que le nombre d'éléments non nuls soit minimum et nous renumérotons de façon que :
$$y_{1},...,y_{r}\neq 0 \; \text {et} \; y_{r+1},..., y_{n+1}\neq 0$$l'équation (2) devient :)
$$h_{j}(x_{1})+... +h_{j}(x_{r})y_{r}=0 \; \;\;\; (3)$$Soit alors h un élément de H opérant sur H comme dans le lemme sur les groupes ci-dessus.
Cela nous donne un système d'équations :
$$hh_{j}(x_{1})+... +hh_{j}(x_{r})y_{r}=0 \; \;\;\; (4)$$Si nous multiplions les équations (3) par h(y1) et (4)par y1 et que nous soustrayons, nous obtenons :
$$h_{j}\left ( x_{2} \right )\left ( y_{2}h\left ( y_{1} \right )-h\left ( y_{2} \right ) y_{1}\right ) + ... +h_{j}\left ( x_{r} \right )\left ( y_{r}h\left ( y_{1} \right )-h\left ( y_{r} \right ) y_{1}\right )=0$$ C'est un système d'équations analogue à (3) mais avec moins de termes, ce qui donne une contradiction, à moins que tous les coefficients : $$y_{i}h\left ( y_{1} \right )-y_{1}h\left ( y_{i} \right )$$ne soient nuls.
Si c'est le cas, alors :
$$y_{i}y_{1}^{-1}=h\left ( y_{i}y_{1}^{-1} \right ) \; \;\forall h\in H$$de sorte que $y_{i}y_{1}^{-1}\in \text{H°}$.
Alors il existe z1, ..., zr ∈H° et un élément k∈K tels que yi=kzi pour tout i.
L'équation (3) avec j=1 devient alors :
$$x_{1}kz_{1}+...+x_{r}kz_{r}=0 \;\; \text{avec} \;\; k\neq 0$$En divisant par k on obtient une relation linéaire entre les xi, ce qui contredit l'hypothèse qu'il s'agit d'une base, et achève de ce fait la démonstration.
Corollaire
Désignons maintenant par $\mathfrak{G}$ l'ensemble des sous-groupes de Γ(L/K). Pour tout H ∈ $\mathfrak{G}$ nous désignons par H° le sous-corps de L constitué des invariants de L par H.
Si G est le groupe de Galois de l'extension finie L/K et si H est un sous-groupe fini de G alors :
[H°:K]=[L:K]/|H|
En effet, d'après le résultat précédent et le théorème de multiplication des degrés :
[H°:K]=[L:K]/[L:H°]=[L:K]/|H|